Le pontificat de Pie IX fut à la fois le plus long de l’histoire de la succession apostolique et celui du dernier “Papa-Re”, entouré d’une Curie romaine chargée du gouvernement de l’Église et de ses États. L’échec des concessions « constitutionnalistes » de 1847-1848 puis l’exil à Gaète déterminèrent une restauration autoritaire, confirmant la Curie comme le conservatoire de pratiques de gouvernement spécifiques. Face au mouvement unitaire italien, la Curie multiplia les adresses théologiques et doctrinales, jusqu’à la réunion du premier concile œcuménique du Vatican ; la brèche de la Porta Pia parut alors solder le combat de l’histoire contre l’éternité. La réclusion de la Curie, partageant la condition d’un pape prisonnier de l’Italie, l’inscrivit dans une logique de gouvernement sans État, entamant un processus de spiritualisation forcée articulé sur l’ecclésiologie de la societas perfecta. Adaptations et réformes mûrirent au long du pontificat de Léon XIII, préparant la mutation définitive de la Curie. Il revint à Pie X, pourtant sans expérience curiale, d’en remodeler le visage (constitution Sapienti consilio, 1908) et d’entreprendre la révision des assises juridiques de l’Église (Codex iuris canonici, 1917). Ayant cessé de servir un pape qui fût aussi un roi, la Curie demeurait l’auxiliaire d’un successeur de Pierre dont le pouvoir pour partie ancré à une terre avait laissé place à une autorité renouvelée sur le monde.